>> Les éléments séparés


Le texte original de Frank Mallauran ecrit pour la version 1.01 en fevrier 1997.

Je me suis levé à 8h45 . Je n'avais plus sommeil. Depuis que je te connais , j'oublie de dormir un peu plus chaque jour. 9h00 Mes mains se mettent à trembler, elles savent qu'elles vont te toucher dans une heure : on doit déjeuner ensemble. 9h15 La chaleur de ma douche me fait le même effet que toi - Tout me calme et ma peau se sent mieux - ta peau est matte , la mienne est blanche - l'eau de ma douche est transparente. 10h00 Tu te goinfres de trucs au beurre, tu ris fort et en même temps tu penches ta tête en arrière comme pour te moquer de Dieu. Tu as raison "on vient de le nationaliser" 10h37 Mauvaise donne : le petit brun aux grandes oreilles n'arrive pas à se réveiller. Il décolle mal ses ailes. Je vais t'abandonner deux heures, c'est le temps qu'il me faut pour ouvrir l'œil 10h45 Les deux puceaux de la rue d'Aubagne pensaient pouvoir me faire la poche droite sans embrouilles 10h49 Ils ravalent leur pucelage - je ne nique personne 11h00 Je ne suis pas en retard . Le petit brun dort encore puis il parle simultanément vénusien, italien, yeti. Le bonhomme est un fumiste au levé mais dans la journée il s'apaise ou se speede, on ne sait jamais. 12h00 Ma faim me troue simultanément l'estomac et la tête.Un jour , te leveras tu à 10heures du matin pour faire le marché avec moi ? Trouveras tu une jolie jupe ? Je parle de ma faim parce que chaque jour j'ai faim deux fois ; une fois pour moi une fois pour toi - tout ça pour te souhaiter un bon milieu de journée mon amour . 12h15 Le petit poilu s'énerve il est bien réveillé - il veut faire des jeux mentaux - un concours de cadavres exquis colossal s'engage, lequel des deux sera le plus schizophrène ? 14h10 Le petit nerveux m'a fatigué, je pense pouvoir être là pour une méchante sieste méchamment belle. Ton double . 14h55 Je redescends la rue de Rome. Dans la foulée je me fais brancher par un genre de croquignole rasta qui me reproche un truc d'il y a deux ans et met facilement vingt minutes à s'apercevoir qu'il ne m' jamais vu. 15h15 Nous aurons été les seuls amants sur terre à souffrir du décalage horaire sans jamais prendre l'avion 15h20 Embrouille à l'angle rue de Rome / pavillon , deux jeunes de 17 - 18 ans essaient de chauffer un zonard habillé en punk kaki - le zonard balance son Rodweiler sur les deux minots dans la foulée le chien mord son maître au poignet - peut on encore faire confiance en son chien aujourd'hui ? 15h30 Les embrouilles à deux francs et la marche me donnent soif, je remonte vers le sixième arrondissement - retrouve le faux plat du quartier et freine au bar du marché. Claque dans la figure je rencontre Kmar. Kmar est mon ex. 15h40 Echange rapide et tendu de quelques mots contrôlés. Deux phrase échangées avec elle me rappellent que notre histoire était abominablement ratée. A l'époque je lui avais fait une déclaration d'amour que je qualifierai d'enflammée. Kmar m'intimidait beaucoup car elle était très belle. Elle m'a fait comprendre que j'étais sur une liste d'attente. Ensuite on s'est un peu perdu de vue puisque de mon côté je suis insaisissable. Je l'ai perdue d'accord , mais belles ou moches je m'en targue d'avoir vingt-huit années. 15h50 L'entrevue avec Kmar m'a un tantinet énervé - je prends une chaise. Sur ce une vielle connaissance éculée se dirige vers moi habillé de noir chevelu de blanc. Lunettes noires, on dirait une mauvaise réplique de Mr Fabulous des blues brothers. Des fois je croise des chiens j'ai envie de les caresser mais ce mec là je n'ai même pas envie de lui serrer la main. Quand le type a fini de te parler, tu sais qui baise qui, pour qui va tomber la dernière subvention. Qui va rater quoi. Ce type est de ce qui ne savent que parler. Ecouter je ne sais pas, mais parler ils savent. Le triste sire me saoule et m'écœure aussi vite qu'une 8.6 tiède - Je prétexte un rendez-vous avec André Malraux pour m'éclipser 16h00 Une lueur me traverse l'esprit dans tous les sens du crâne - je réalise que j'ai bien trois heures de retard, tu as du rentrer chez toi et passer tes nerfs sur quelque chose qui se mange ou qui se boxe. Je téléphone d'une cabine. Carte. Bip. Numéro. Patientez. Composez. Appel Tonalité 1.2.3. Répondeur Aïe Je me ramasse comme l'Exxon Valdez en terre vierge. Plein de brut. Réflexe j'appelle mon Homme/home, interroge mon répondeur. Ta voix m'y indique que tu préfères aller à la plage avec tes copines plutôt que de poireauter 3 heures pour un fiancé qui préfères aller réveiller un emmerdeur téléphage et parano au lieu de terminer son petit déjeuner avec sa copine chérie. Au milieu de ta froide colère tu me communiques quand même un éventuel appel voire un hypothétique passage aux alentours de 21h. Ciao. L'Exxon Valdez s'éventre et je me répand sur la plage - loin de la tienne bien sûr 16h20 Je n'ai qu'une mission à accomplir : me faire excuser - faire des courses, inviter la miss à dîner chez moi et être très cool. Direction Toinou pour les crustacés. Pour le vin j'ai mes adresses. Remonter chez moi afin de préparer un cassage de ventre des plus soft pour ma princesse. 18h00 Faire ses courses tôt c'est prévoyant, les faire à la sortie des bureaux c'est du masochisme. Quoi qu'il en soit mes sacs sont pleins mes bras me tirent. Le temps lui ne s'étire pas. Arrivé chez moi je réalise qu'il me reste une heure et demi pour nous préparer à manger 19h35 Allumage de la lucarne argentée et dégustation d'un Regusse rosé. Début du générique de la célèbre nationale "Les Fleurs de la Passion" où l'on retrouve de jeunes gens très mal coiffés, passablement habillés mode. Utilisant un français très ralenti. Les rires se déchaînent dès qu'un protagoniste passe une porte ou qu'un faux homosexuel shooté aux protéines de synthèse se met à mouliner du poignet ou de la hanche. Le parfum et la vapeur de mes chaudrons font gigoter leurs couvercles 20h42 Fin de cuisson. Timing exceptionnel- la fierté m'envahit. Mes antennes se mettent à bourdonner. Mon cœur bat vite - le trac me gagne il va se passer quelque chose. On sonne . Je fais l'air du mec hyper calme presque étonné de te voir mais pas trop. Ce qui m'étonne le plus c'est ta beauté. Même si tu as les cheveux collants de mer et que le soleil t'a rendue plus rose que les crevettes dans ma marmite - je te vois tu m'éblouis et je me met à bronzer 20h43 On va remettre le dîner à plus tard je crois.

1997 Frank Mallauran
2001 [daltex-lab]

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